« Dix petites minutes qui pourraient changer le cours de notre Histoire » : l’étrange émissaire praguois n’en a pas demandé plus à Emmy Destinn.

Donc, elle n’avait pas rêvé : on l’espionnait à bord du paquebot qui la ramenait à New York. La diva tchèque doit y créer, ce 10 décembre 1910, l’écrasant rôle-titre de La Fanciulla del West, dernier opéra de Puccini, au côté d’Enrico Caruso et sous la férule de Toscanini. Le moment est-il bien choisi pour renverser François-Joseph et la double monarchie ?

Certes, on ne lui demande que de transmettre des documents secrets au cours de ses tournées européennes. Le risque de haute trahison ? Emmy le court déjà en sacrifiant son art à la routine et en trompant son amant avec un baryton français ! Quant à la gloire, elle ne se conquiert pas deux fois…

La jalousie de Geraldine Farrar, l’affection de Caruso, la nostalgie de la Bohême : autant de partenaires de la « divine Emmy », au moment où s’engage le dernier acte de sa carrière. Des accents fitzgeraldiens teintent ce « roman théâtral », inspiré du destin d’Emmy Destinn (1878-1930), cantatrice et résistante dont le portrait orne aujourd’hui le billet de 2 000 couronnes tchèques.