Derrière ce titre, qui évoque un conte écologique sur le thème de la fertilité des sols, se construit une agronomie d'une dimension nouvelle. L'auteur invite à juger si, « d'un point de vue économique, M. le Capital et Mme la Terre ont jamais fait bon ménage ».

Cette mise en scène de ces deux personnages immenses et inattendus exprime en effet que le capital comme la terre ne sont pas des objets mais, des faits sociaux intervenant dans la production et surtout la production alimentaire. Elle évoque entre la terre et le capital un rapport organique plus que matériel.

Face à une politique économique qui, réduisant la terre et l'homme à des grandeurs économiques, condamne à la mort des millions de femmes et d'hommes par ce qu'elle ne les considère que comme porteurs d'une marchandise au rebut : leur force de travail, Claude Reboul met en évidence la spécificité de l'agriculture et particulièrement l'agriculture alimentaire, qui, plus que tout autre activité économique, échappe aux spéculations des économistes néo-classiques (dits « libéraux »). La terre, source de toute subsistance est étroitement liée, à travers l'entretien de la vie, au problème de la rémunération du travail. Elle n'est d'aucune façon « une marchandise comme les autres », pas plus que la force du travail elle-même.

« L'analyse économique des pratiques culturales qui modifient la fertilité des sols, tant en France que dans les pays de l'Est ou en Afrique sahélienne, contribue à son maintien ou son accroissement, évitant tous les excès du naturalisme qui sousestime les possibilités d'intervention humaine, de l'agronomisme qui les surestime, de l'économisme qui rêve d'un univers où tout est marchandise, même les
âmes... ».

Enfin il donne des armes scientifiques à l'écologie, cette « science des relations entre une population d'êtres vivants et son milieu naturel qui, voulant s'appliquer aux sociétés humaines, s'enrichit d'un contenu politique dont la nécessité se fait d'autant plus sentir qu'elle ne trouve guère d'expression dans les organisations politiques dominantes, car l'étude des relations entre une société et son environnement renvoie à celle des rapports sociaux qui sous-tendent ces relations ». Claude Reboul contribue ainsi à consolider et approfondir le combat écologique au moment précis où celui-ci prend une dimension nouvelle.